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« Il faut former des jeunes capables de s’adapter »

« Beaucoup de jeunes reprochaient d'opposer les modèles, alors qu'il faut, au contraire, les réconcilier », défendent Michel et Juliette Gaudin, professeurs dans l'enseignement agricole.

Juliette et Michel Gaudin, professeurs en zootechnie et économie-gestion, ont enseigné pendant une trentaine d’années au lycée agricole de Laval. Ils reviennent sur trois décennies d’enseignement agricole.

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Comment a évolué le programme de l’enseignement agricole ?

Juliette Gaudin : « La souplesse du programme nous permet de rester connectés aux nouvelles réglementations. Dans les années 1980, on ne parlait même pas de bien-être animal ou de la réglementation, il a fallu les intégrer. »

Michel Gaudin : « Dans les années 2010, on a lancé un module consacré à l'énergie en calculant le prix de l’énergie sur les exploitations et en réalisant des visites de méthaniseurs. Demain, les élèves seront des producteurs. Il faut former des jeunes capables de s’adapter car leur métier est en constante évolution. La base de mon métier, elle, n’a pas changé : c’est d’aider les jeunes à avoir une autonomie en gestion pour s’installer et gagner sa vie. J’ai une crainte, c’est le développement excessif de l’apprentissage. La présence en classe permet une réflexion collective autour des pratiques, de leurs évolutions. Oui au terrain mais attention à ne pas mettre en péril le temps de réflexion. »

Quelle place pour l’agroécologie dans l’enseignement ?

MG : « Pendant la réforme du BTS Acse (1), il ne fallait plus parler que d’agroécologie, c’était le nouveau mantra. Mais il faut aussi étudier les systèmes productifs. Beaucoup de jeunes reprochaient d’opposer les modèles, alors qu’il faut, au contraire, les réconcilier. »

JG : « Si on veut être crédible, il faut rester objectif en allant voir toutes sortes d’exploitations. A l'occasion des premières visites d'exploitations bio dans les années 1990, je devais briefer les jeunes pour qu’ils soient à l’écoute. Ils avaient des a priori. Les enfants d’agriculteurs sont devenus très tolérants par rapport à il y a trente ans. »

Quelles sont les différences entre les élèves des années 80 et des années 2020 ?

JG : « Pour la même tranche d’âge, les jeunes sont beaucoup moins concentrés et un peu moins à l’écoute. On a vu l’arrivée des téléphones dans les poches. »

MG : « Auparavant, je faisais deux heures d’enseignement sans problème, ces dernières années au bout d’une heure, il fallait les mettre en activité. Si on n’adapte pas sa pédagogie, on va dans un mur. »

De nouveaux étudiants pour une nouvelle génération d’agriculteurs ?

MG : « Ce qui est nouveau, c’est que nos jeunes recherchent des moyens de diminuer la pénibilité physique et de se libérer du temps. L’exemple le plus massif, c’est le robot de traite. On a une jeunesse aujourd’hui qui vit en couple avec l’autre personne qui exerce un travail différent. Si on veut maintenir de l’élevage, il faut utiliser la technologie, de manière raisonnable. »

JG : « Dans les années 1980, c’était le couple qui s’installait et la traite était un métier essentiellement féminin. On s’est davantage intéressés à sa mécanisation quand les hommes se sont dit qu’il allait falloir s’y mettre. »

(1) Michel Gaudin a participé à la réforme du BTS Acse qui s’est déroulé de 2014 à 2016.

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